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Le château de Longues-Aygues

La construction 

Selon un projet de son mari et certainement en son honneur, Mme Vaïsse-Cibiel décida de la construction du château comprenant plusieurs centaines d’hectares, des plaines de Vaïssac à celle de Nègrepelisse (jusqu’au lieu-dit de la Sorbonne). A l’origine, une maison de maître était assise sur les fondations même du château dont on peut encore observer un mur en argile crue. L’entreprise commença en 1902 et se termina en 1910 sous la contrainte pressante de la date du mariage de sa fille. Certainement influencé par ses nombreux voyages à Florence et à Nice , elle fait appel à un architecte italien. Le style particulier de l’édifice rappelle sans conteste l’architecture italienne mais également le style toulousain (dont elle est originaire) avec l’utilisation de briques en argile cuite cintrant toutes les ouvertures. La toiture avec ses tuiles vernissées, ses scraffitos ( technique artistique d’enduit gratté laissant apparaître la première couche) sur les deux tours (réalisés entre 1928 et 1939), des faïences représentant du laurier, de nombreuses moulures symbolisant des anges surplombant les pièces, la végétation extérieure et intérieure composée de palmiers, de conifères évoquent les luxueuses demeures méditerranéennes.
Les ferronneries, les lustres, les candélabres, et le plancher, longtemps ciré à la main sont également d’époque et fort bien conservés par les propriétaires.
Seule, la verrière du jardin d’hiver, à l’entrée du château fut remplacée par un hall abrité. Des tapisseries décrivant des scènes de chasse accueillent de part et d’autre du couloir d’entrée, les visiteurs.
L’escalier de bois, aux décorations angéliques, transformé en 1963, est inondé par une lumière diffuse en provenance d’un magnifique puits de lumière offert par des vitraux art-déco.
Certainement en rapport avec le nom du lieu-dit « Grenouillat », les gouttières ont été ingénieusement effilées par des bouches ouvertes de grenouilles.

Dès lors, le château et ses 6 ha de parc, racheté par M. André Marie en 1962, fut le premier établissement de postcure psychiatrique de France dont l’inauguration eut lieu en juillet 1964.

La famille Vaïsse Cibiel

Sylvain Marie Joseph (1862-31 mai 1891 à Toulouse) conseiller général de Nègrepelisse épousa en 1889 Dame Amélie Henriette Marie Germaine Mignard et mourut précipitamment à l’âge de 29 ans, un an après la naissance de sa fille unique, Marguerite. Sa générosité fait encore parler de lui puisqu’il légua des dons en argent à la société protestante et catholique de secours mutuel de Nègrepelisse. Son trisaïeul, Emile fut un érudit, mainteneur des Jeux Floraux (concours annuel de poésie en langue d’Oc, sur un sujet glorifiant Dieu ou la Vierge), et a laissé un prix annuel (l’œillet d’argent) pour le meilleur sonnet.
D'aristocratie toulousaine et montalbanaise, Amélie Henriette Mignard (née en 1863) descendante de Pierre Mignard (1612-1695, œuvre majeure : décoration du dôme de Val-de-Grâce), nommé premier peintre de Louis XIV en 1690, dont les madones aux airs inspirés ont donné le mot "mignardises", fut mère et veuve très jeune. Cette belle femme s’attira les grâces du sculpteur Antoine Bourdelle. Muse ou mécène, elle posa de nombreuses fois dont l’un des bustes est exposé au musée Rodin à Paris. Il est même dit qu’elle participa en tant que modèle au monument de la guerre de 1970, sis à Montauban, en face du musée Ingres.
Propriétaire de nombreux domaines, dont l’un dans l’Aude « La Mignarde », à proximité de Carcassonne, de deux à Nice, Dame Henriette était également l’ami de Jean Fleury dont une avenue porte son nom à Nègrepelisse. De la générosité de la famille, reste à jamais une cloche gravée en l’honneur d’Henriette, à l’Eglise Saint Pierre-Es-Liens, à Nègrepelisse. Elle n’eut qu’une seule fille, Marie Joseph Gabrielle Marguerite ( 26 décembre 1888 à Toulouse-1975, enterrée avec son époux au cimetière de Nègrepelisse).
A l’âge de 22 ans, le 7 juin 1910, elle convole en justes noces avec Joseph Anne Marie Vital Marcellin De Gentil-Baichis dénommé Marcel (1878-1954) à l’habitation des Vaïsse-Cibiel en raison de la maladie de son beau-père empêchant tout déplacement. Fils de François de Gentil-Baichis, officier de marine distingué et chevalier de la légion d’honneur à 26 ans, il est descend d’une vieille famille noble montpelliéraine. De leur union, naquis un fils unique, François, né le 29 juillet 1913, qui sera la grande passion de sa grand-mère.
Après avoir réalisé de brillantes études de droit et devenu avocat stagiaire au barreau de Toulouse, il devint officier de cavalerie et meurt le 24 mai 1940, à l’âge de 27 ans, au cours d’une mission de liaison.
Sa mère sera internée, mourant de chagrin et son père finira seul ses jours dans la chambre de la tour droite du château.

Egérie de Bourdelle

Bourdelle éprouva une véritable passion pour Henriette Vaïsse-Cibiel à laquelle il dédia de nombreux poêmes entre 1896 et 1897. Elle posa ainsi pour le Cuirassier du Monument de Montauban. De cette époque date un portrait très naturel qui doit être contemporain des différentes études pour le cuirassier. On y reconnait bien le profil impétueux au nez marqué et les lèvres fines et allongées que l'on retrouve dans le buste en marbre auquel Bourdelle travaillait dès l'été 1902. Avant d'achever ce buste en 1902, il est dit qu'il devait la faire poser assise légèrement de trois quartet en contre-plongée, face à l'objectif, afin de s'inspirer des clichés obtenus pour la construction du marbre correspondant. Il voyait "quelque lueur", dans l'oeuvre de préparation, mais la jugeait encore insuffisante, préoccupé à l'idée du départ de son modèle "avant les heures de la plus haute beauté" et conscient du "travail immense à faire pour ramasser vite les éléments de lumière" avant leur transposition dans le marbre.

 

"Il y a plus haut, il y a le sublime d'une lèvre, l'indicible de la forme que je ne fais là que balbutier. Certes le front rayonne, le regard est grave dans le cadre de l’œil rieur et la bouche est mouvante comme un baiser ou comme une parole [...]. Cette fille de mon labeur à quelque vertu..." écrivait-il à une amie à l'époque, tout en demeurant insatisfait du travail du visage.

L'un des bustes représentant la nègrepelissienne fut crée entre 1903 et 1904. Ce buste en marbre est une commande de Madame Vaïsse-Cibiel à Antoine Bourdelle que celui-ci représenté au salon de la Société Nationale des Beaux-Arts à Paris en 1904. Le Musée Bourdelle possède un marbre inachevé de Dame Vaïsse-Cibiel qui est actuellement exposé dans l'atelier préservé du sculpteur.

 

Il existe également :

  • Un portrait d'Henriette Vaïsse-Cibiel, sans les épaules, en plâtre et en bronze, de dimension légèrement inférieure dont une épreuve en bronze est exposée dans "l'aile Portzamparc" du Musée Bourdelle avec les différentes études pour le Monument de Montauban, dont la nèrgepelissienne avait servi de modèle pour le cuirassier.
  • Un masque en plâtre conservé dans les réserves du Musée Bourdelle